GESTION D'UN DOSSIER DE RESPONSABILITE FINANCIERE

Dans tous les cas où une défaillance est constatée, voire même pressentie, dans la tenue de la comptabilité ou dans la représentation des fonds clients, il appartient aux chambres départementales de saisir immédiatement la chambre régionale d’une demande d’ inspection approfondie dans l'étude et de prendre les mesures propres à sauvegarder les intérêts de la profession. 

La Chambre Nationale devra être informée des difficultés pressenties, même si la situation comptable devait se régulariser par la suite.

  Le comité d’assistance institué auprès de la caisse de garantie peut aider les inspecteurs régionaux à vérifier la comptabilité et établir la trésorerie réelle de l’office. Attention toutefois : ce n’est que sur rapport constatant les difficultés rencontrées pour approfondir les opérations d’inspection que la chambre nationale peut être saisie par courrier auquel devront être annexés :

·     Les rapports d’inspections ;

·     Les points posant difficultés et les anomalies constatées ;

·     Le détail de la mission souhaitée

·     La délibération de la chambre régionale organisant le contrôle, désignant les deux inspecteurs régionaux (hors département concerné) et deux inspecteurs suppléants, la décision de faire appel à un expert-comptable pour assister les deux inspecteurs.

·     Eventuellement, l’accord écrit du titulaire permettant d’adjoindre aux intervenants un huissier de justice honoraire désigné par la chambre nationale

 
Le rapport qui sera dressé à l’issue cette inspection sera communiqué à la chambre nationale laquelle assurera la diffusion commentée auprès des instances locales, à charge pour celle-ci d’en diffuser la teneur auprès des titulaires de l’office concerné et de l’autorité de tutelle s’il y a lieu.

Trois types de sinistres "responsabilité financière" peuvent se présenter :

 

·       insuffisance de couverture du compte clients résultant de prélèvements excessifs du titulaire de l'office,

 
·       déficit d'exploitation résultant d'une mauvaise gestion entraînant un déséquilibre entre les charges et les produits,

 
·      comptabilité falsifiée par des règlements fictifs, des transferts de comptes débiteurs sur un compte fictif ou par l'établissement de faux actes, ou bien encore par l'utilisation d'une comptabilité parallèle.

 
 

Quelle qu’en soit la raison, si l'inspection approfondie confirme donc la défaillance de trésorerie un certain nombre de mesures devront être immédiatement prises par les responsables locaux à savoir notamment :

 

·          la suspension provisoire du ou des titulaires,

·          la nomination d’un administrateur, parmi les confrères d’un autre arrondissement,

·          la prise de garanties,

·          la cession rapide de l’office avec signature concomitante au traité de cession d’une délégation de créance au profit de la chambre nationale.



ADMINISTRATION ou SUPPLEANCE CHOIX DU REGIME

 

La nomination d'un administrateur intervient à la suite d'une sanction disciplinaire prononcée à l'encontre de l'huissier de justice titulaire (ordonnance du 28 juin 1945 L et décret de 1973). Elle peut également intervenir par suite d'une mesure de suspension provisoire conformément à l'article 32 de la susdite ordonnance.

 La mesure de suppléance est envisagée lorsque le titulaire de l'office ne peut plus exercer pour cas de force majeure (ex : raisons médicales ; information pénale avec interdiction d’exercer, décès ou démission du titulaire - décret du 20 mai 1955 - loi de 1973)

 

C’est donc en principe un régime d’administration qui doit être instauré. La chambre départementale devra dans l’urgence déposer une requête pour faire statuer en référé et obtenir la suspension provisoire du titulaire. Puis dans le délai d’un mois, une procédure disciplinaire devra être engagée, sauf procédure pénale en cours.

La suppléance ne pourra se justifier que par suite de la démission du titulaire ou de son empêchement d’exercer notamment par suite de l’ouverture d’une information pénale, avec interdiction d’exercer.

GESTION DE L’OFFICE

La Chambre Nationale dispose d'un délai d'un mois pour régulariser une déclaration de sinistre auprès de la Compagnie d'Assurances. Il est donc indispensable que la Chambre Départementale chiffre de façon précise le sinistre lors de l'arrêté de comptes pour éviter à la profession de supporter un poids financier qui aurait dû normalement être pris en charge par la Compagnie d'Assurances.

 
Dès confirmation du déficit, un rapport sur la situation financière de l’office sera dressé :

·      trésorerie disponible ; La trésorerie existante au jour de l’ouverture du sinistre, doit être affectée uniquement aux règlements des fonds clients. Elle ne peut permettre de régler les charges d’exploitation impayées.

·          montant des sommes dues aux clients,

·      liste des charges afférentes au fonctionnement de l’office demeurant impayées. Quelque soit le régime mis en place, administration disciplinaire ou provisoire, suppléance, règlement en priorité des charges d’exploitation nées postérieurement au départ du titulaire.

La caisse de garantie affecte au dossier immédiatement une provision pour charge Cette provision dépend également des renseignements donnés par les chambres départementales sur l’existence d’un patrimoine du défaillant.

1. ARRETE DE COMPTES

Afin d’assurer le caractère contradictoire, le titulaire doit donc être convoqué par lettre recommandée avec accusé de réception. Si celui-ci est incarcéré, une demande de levée d’écrou doit être adressée au magistrat chargé de l’instruction.

Les comptes de l'office doivent être arrêtés dans un délai de huit jours. Cet arrêté doit être contrôlé et visé par la Chambre Départementale qui peut procéder ou faire procéder à toutes vérifications utiles (art. 25 - décret du 28/12/1973). Ce court délai de 8 jours ne permet pas de reprendre physiquement l’ensemble des dossiers. Il convient donc d’éditer l’ensemble des fiches comptables, et de tirer informatiquement la situation de trésorerie à partir de la balance dossiers et de la balance générale après rapprochements bancaires.

 
L’administrateur, le suppléant ou un membre de la chambre départementale doit également procéder ou si nécessaire faire procéder par tout professionnel à la sauvegarde totale du disque le jour de l’arrêté des comptes et avant de procéder à celui-ci.

 
Pour accomplir sa mission, l'administrateur ou le suppléant peut demander l'assistance d'un huissier de justice honoraire et/ou d'un expert-comptable. La prise en charge de l’ensemble des frais est assurée par la Chambre Départementale ou le titulaire de l'office défaillant.

 
Si l'arrêté de comptes confirme le déficit, la Chambre Départementale ou régionale doit alors impérativement confirmer la déclaration provisionnelle de sinistre "responsabilité financière".

 Dans un second temps, l’arrêté des comptes dossier par dossier devra être établi avec rectification éventuelle des honoraires et actes frustratoires. Pour ce faire, il conviendra de se référer à l'imprimé type joint en annexe à la présente.


2. MESURES DE GESTION IMMEDIATES

 

La comptabilité de l'administration ou de la suppléance devra être parfaitement séparée de la comptabilité du défaillant.

 

Il est impératif de :

 

·   bloquer les comptes anciens en communiquant au banquier, chef de centre CCP et autres, les dispositifs de la décision judiciaire prononçant l'administration.

 

·   virer la trésorerie existante sur un compte affecté aux fonds de tiers, au nom de l’office administré gestion du titulaire.

 
·   Ouvrir un second compte bancaire « intitulé compte affecté »au nom de l’administration ou suppléance - pour recevoir l’ensemble des fonds provenant de l’exercice de l’administration.


·  Ouvrir un troisième compte bancaire sur lequel seront transférés chaque fin de journée les fonds qui permettront de gérer l’office.

 
·  Affecter en compte d’exploitant une ligne comptable correspondant au montant du sinistre constaté (dette du titulaire vis à vis de l’office). Cette ligne sera apurée au fur et à mesure des indemnisations de la CNHJ ou d’un apport du titulaire défaillant. Cette mesure permet alors à l’administrateur – suppléant- d’avoir uniquement en balance générale et tableau de bord, le résultat de sa propre gestion ;

 
·  Changer les serrures de toutes les portes donnant accès à l’office

 
·  Changer les clés et codes du système informatique

 
·  Stopper le règlement des charges sociales personnelles par l’étude ; mettre fin aux prélèvements dont l’objet ne relève pas du fonctionnement normal de l’office ;

  

La chambre nationale pourra déléguer un expert comptable, membre du comité d’assistance, dès la nomination de l’administrateur , pour qu’il puisse sur pl aider à mettre en œuvre les mesures ci-dessus.

1 LE ROLE DE L’ADMINISTRATEUR

 

·       - L'administration.

Dans le cadre d'une administration mise en place à la suite du prononcé d’une sanction disciplinaire, l'administrateur a pleine autorité sur l'étude. Il prend notamment les décisions qui concernent l'adaptation de l'effectif du personnel aux besoins de l'office. Il supporte le règlement des salaires et charges et les éventuelles indemnités consécutives au licenciement jusqu'à concurrence du montant des produits (art. 27).

L'administrateur doit également payer à concurrence des produits de l'office les charges afférentes au fonctionnement de cet office (art 20). Si ceux-ci s'avèrent insuffisants, les charges visées aux articles 20 et 27 sont alors prises en charge par la Chambre Départementale.

L’administration d’un office par suite d’une mesure disciplinaire prononcée à l’encontre d’un titulaire demeure régie par la loi du 25 juin 1973 et le décret du 28 décembre 1973 relatifs à la discipline. En confiant à la Chambre Nationale, l’obligation de garantir la responsabilité professionnelle des huissiers de justice vis à vis des tiers, la loi du 13 juillet 1992 n’a pas modifié ce point précis.

En conséquence, la Chambre Départementale reste tenue des charges d’une administration déficitaire. Les sommes payées par la Chambre Départementale au titre de l’article 28 de l’ordonnance de 1945 donnent lieu à recours sur l’huissier de justice interdit, destitué.

 
. administration provisoire.

 
Les obligations de l’administrateur provisoire sont les mêmes que celles dévolues à l’administrateur nommé par suite d’une mesure disciplinaire.

 
Attention : dans le délai d’un mois, des poursuites disciplinaires ou pénales doivent être impérativement engagées, faute de quoi la mesure de suspension provisoire est caduque.

 

. Suppléance

 
Le suppléant doit informer le suppléé de toute mesure de restructuration jugée nécessaire, rendre compte de sa gestion et solliciter du suppléé le paiement des charges liées au fonctionnement de l’office lorsque les produits dégagés par la suppléance sont insuffisants pour en assurer le règlement.

2 REMUNERATION DE L’ADMINISTRATEUR

. Administration

L’administrateur nommé à la suite d’une sanction disciplinaire perçoit, les émoluments et autres rémunérations relatifs aux actes qu’il a accomplis.

 
Le titulaire de l’office perd vocation à percevoir les produits de son office. Le règlement de ses charges personnelles est à sa charge.

. suspension provisoire

L’administrateur, nommé par suite d’une mesure de suspension provisoire prononcée à l’encontre de l’huissier de justice titulaire, ne perçoit que la moitié des produits nets de l’office (ordonnance de 1945 – décret de 1973).

 

L’administrateur provisoire paiera avec le montant des produits nets lui revenant, ses charges sociales personnelles.

 

La détermination des produits nets à revenir, à l’administrateur et au titulaire, se fait donc avant et hors imputation des charges personnelles du titulaire de l’office et bien sur de l’administrateur provisoire.

. Suppléance

 Les produits nets se répartissent par moitié entre le suppléant et le suppléé sauf convention expresse qui ne peut toutefois excéder une répartition 1/3 – 2/3

3 REDDITION DES COMPTES EN COURS D’ADMINISTRATION

 
 
Une reddition des comptes d’administration, contradictoire et en présence d’un membre de la chambre départementale est obligatoire à la clôture de chaque exercice comptable et à l’issue de chaque période d’administration.


GESTION FINANCIERE DU DOSSIER

1. MESURES PROPRES A SAUVEGARDER LES INTERETS DE LA PROFESSION

La chambre départementale doit avoir comme souci constant de réduire autant que faire se peut le coût final du sinistre. Pour cela, elle dispose d'une garantie principale, le patrimoine de l'huissier, qui se décompose comme suit :

·       le prix de cession de l’office ou la valeur des parts sociales,

·       le patrimoine mobilier du ou des titulaires

·       le patrimoine immobilier du ou des titulaires

Toute mesure conservatoire, à titre conventionnel ou judiciaire devra être prise. Il conviendra ensuite, dans le délai d'un mois, de constituer avocat pour engager la procédure au fond, afin de faire constater la créance de la Caisse de garantie et de la Chambre Départementale éventuellement dans le cadre de l’article 28 pré-cité.

 

La Chambre Départementale devra également mettre tout en oeuvre pour que la cession de l'office intervienne rapidement, le prix de cession devant être évalué selon les critères retenus par la Caisse de prêts. Le potentiel d'activité peut également venir influer sur le prix. Enfin, une reconnaissance de dette avec cession de créance de la totalité du prix de cession et des produits bruts de l'office devra être signée par l'huissier de justice défaillant au profit de la Chambre Nationale.

 

Une collaboration étroite et constante, entre la chambre départementale et la Chambre Nationale, est donc impérative.

L’accord préalable de la chambre nationale doit être requis avant la mise en place d’une procédure collective. Dans l’hypothèse où cette solution serait retenue, l’administrateur huissier de justice qui sera désigné sera administrateur de l’office et non de la SCP

2. DESINTERESSEMENT DES CREANCIERS

L'administrateur doit vérifier le caractère certain et exigible des créances et communiquer à la Chambre Nationale, en priorité, les listes de dossiers dans lesquels des réclamations pressantes et justifiées ont été reçues (avec référence à l'arrêté de comptes). Parallèlement, l'administrateur devra informer le client de la prise en considération de sa créance et lui soumettre pour accord le décompte du dossier .

 

Un relance comportant un décompte détaillé, avec historique des acomptes, doit être adressé au débiteur avant la reprise des poursuites. Le courrier doit préciser qu’à défaut de réponse dans les huit jours, l’exécution sera reprise. Ce document permettra de s’assurer, par recoupement avec le décompte « créancier », des fonds réellement encaissés et non reversés.. (ne pas omettre dans l'arrêté de comptes de déduire le montant des frais, débours et honoraires dus à l'huissier de justice défaillant. Ces décomptes doivent être revêtus du cachet de l’office et de la signature de l’administrateur « encre bleue » afin d’attester du caractère original du décompte.

Au reçu du décompte, la caisse de garantie établira alors un chèque de règlement libellé à l’ordre du créancier ou de son mandataire, accompagné d’une quittance subrogative. Ces documents sont en principe adressés à l’administrateur à charge pour lui de répercuter le règlement et la quittance au client. *

Il peut être toutefois dérogé à ce principe auquel cas le chèque et la quittance seront directement adressés par la chambre nationale au client, ce dernier étant bien sur invité à retourner à réception un exemplaire dûment régularisé de la quittance. Ce dernier se désistera ainsi de toute réclamation ou action à l'encontre de l'huissier de justice concerné et subrogera la Chambre Nationale dans ses droits.

 

Ces justificatifs sont impératifs tant dans le cadre des recours exercés à l’encontre des défaillants (les magistrats exigent le décompte, la quittance et l’avis de débit bancaire) que dans le cadre des pièces à fournir à la compagnie d’assurances lorsque celle-ci est amenée à intervenir.

 

La Chambre Départementale sera tenue étroitement informée de l’état d’indemnisation des dossiers. Elle devra elle-même communiquer à la Chambre Nationale des Huissiers de Justice copie de toutes pièces de procédure, correspondances, décision de justice (désignation de suppléants, administrateurs, redressement judiciaire)

 

Si l'office sinistré fait l'objet d'un règlement judiciaire ou d'un dépôt de bilan, les règlements ne peuvent en principe intervenir qu'au vu de l'état des créances vérifiées et accepté par le juge commissaire. Toutefois, afin d’aider les administrateurs, suppléants, candidats ou non à la reprise de l’office ou au rachat des parts sociales, il a été décidé que dans chaque dossier de liquidation les créances relatives à la liquidation des droits à la retraite ou à une couverture sociale ou à caractère prud’homales seraient prises en charge immédiatement, et en totalité sur présentation des décomptes acceptés.

 

Pour les autres créanciers, l’indemnisation ne pourra intervenir qu’avec l’accord du représentant des créanciers et du mandataire et selon un pourcentage de l’ordre de 30 à 40 % maximum dans l’attente de l’état définitif ou d’une décision de justice donnant un caractère certain à la créance.

 

Cette procédure lourde, notamment pour les clients, peut être écartée si l’arrêté des comptes a pu être accepté par le défaillant.

3. ACTIONS RECURSOIRES

 

Il s'agit de diligenter les mesures nécessaires au remboursement des fonds avancés par la Chambre Nationale au titre de la franchise, c'est-à-dire la réalisation de la totalité des biens de l'huissier de justice défaillant.

 

Ce n'est que par l'efficacité des recours contre l'huissier de justice défaillant, notamment par la vente de l'étude, que les fonds avancés par la Chambre Nationale au titre de la franchise contractuelle pourront être reconstitués.

 

L’arrêté des comptes doit donc être soumis à l’examen du défaillant afin de recueillir un contradictoire. La non réponse de ce dernier, au courrier recommandé, sera considérée comme valant accord.

 

Il n'est pas inutile de rappeler également que toute mesure doit être prise pour interdire toute réinstallation de ou des huissiers de justice à l'origine de la défaillance. La démission signée par le ou les huissiers de justice doit contenir engagement de ne pas se réinstaller. Mais il est souvent opportun en outre que la Chambre Départementale prenne l'initiative d'une procédure disciplinaire si celle-ci n'est pas mise en oeuvre par le Parquet.