COTITULARITÉ ET TRANSMISSION DU DROIT AU BAIL

 

Le principe de la co titularité du bail du logement familial résulte des dispositions de l'article 1751 du Code civil.

 

« Art. 1751. ‑ Le droit au bail du local, sans caractère professionnel ou commercial, qui sert effectivement à l'habitation de deux époux est, quel que soit leur régime matrimonial et nonobstant to convention contraire, et même si le bail a été conclu avant le maria réputé appartenir à l'un et à l'autre des époux.

 

« En cas de divorce ou de séparation de corps, ce droit pourra être attribué, en considération des intérêts sociaux et familiaux en cause par la juridiction saisie de la demande en divorce ou en séparation corps, à l'un des époux, sous réserve des droits à récompense ou à indemnité au profit de l'autre époux ».

 

Il convient de rappeler :

 

que les conjoints ne bénéficient de la co titularité du bail qu'à la double condition que le bail n'ait pas de caractère professionnel et qu'il serve effectivement à l'habitation des deux époux (Cass. 3ème civ., 28janv. 1971 : JCP N 1971, 11, 16982 et note R), ce qui exclut le bail à usage mixte (CA Paris, 16 nov. 1999 ).

 

que l'application de ce texte ne peut, en principe, être étendu aux habitations plaisance et aux résidences secondaires (CA Orléans, 20,févr 1964 : D. 1964, p. 2) qui ne sont pas, par nature, destinées à servir d'habitation effective aux deux époux.

 

Si le deuxième alinéa de l'article 1751 du Code civil prévoit le sort du bail ‑ dont la co titularité est affirmée par son alinéa 1er ‑ pour le cas de divorce des époux, rien n'est précisé en revanche pour le cas de décès de l'un d'eux. Ainsi, en cette dernière circonstance, le droit locatif du survivant des époux subsiste mais l'article 1751 ne modifiant pas,les règles de la dévolution successorale le droit au bail passe également aux héritiers, légataires universels ou à titre universel du prémourant des époux (Cass. 3' civ., 26juin 1996 : JCP G 1996, IV 1917).

 

Il existe un droit exclusif du conjoint. ‑ En vue d'éviter les conflits pouvant éventuellement résulter de la pluralité de titulaires du droit de bail à la suite du décès de l'un des deux époux, la loi du 3 décembre 2001 a complété l'article 1751 du Code civil par un troisième alinéa revoyant désormais, et de façon expresse, qu'en pareille circonstance le conjoint survivant, co titulaire du bail disposera d'un droit exclusif sur celui‑ci, sauf s'il y renonce expressément (L. 3 déc. 2001, art. 14, 1). Ce n'est donc que dans le cas d'une renonciation expresse suivant une forme qui n'est pas précisée ‑ que les héritiers de époux prédécédé retrouveront leur qualité de titulaires du droit au bail .

 

 

En absence de co titularité. Lorsque le conjoint survivant ne peut se prévaloir des dispositions de l’article 1751 du Code civil ( ex : en l'absence de cohabitation effective lors de l'abandon de domicile par l'un des époux ou en cas de logement à usage mixte d'habitation et professionnel)  la loi lui reconnaît  le droit au transfert du contrat de location. Le septième alinéa de l'article 14 de la loi n°  89‑ du 6 juillet 1989 relative au bail d'habitation est modifié en ce sens (L. 3 déc. 2001, art. 14, 11). Mais, dans ce cas, le conjoint survivant  ne bénéficie pas d'un droit exclusif au transfert du bail, le même article 14 de la loi du 6 juillet 1989 accordant, en effet, le droit au transfert du bail à d'autres personnes et, en particulier, aux descendants ‑ aux ascendants, au concubin notoire ou aux personnes à charge, qui vivaient depuis au moins un an avec le locataire à la date du décès (L n° 89‑462, 6juill. 1989, art. 14, al. 8 et 10). Lorsque le conjoint sera mis en concours sur le droit au bail avec d'autres év bénéficiaires et que des demandes multiples seront formulées, le juge, saisi à cet se prononcera en fonction des intérêts en présence (L. 6 juill. 1989 art. 14, al. II).

Les modifications consécutives à la loi du 15 novembre 1999 relative au pacte civil de solidarité

L'article 14 étend « au partenaire lié au locataire par un pacte civil de solidarité » le bénéfice de la poursuite du bail en cas d'abandon de domicile ou de décès du locataire. L'article 15 autorise le bailleur à reprendre le logement au profit de ce même partenaire ou de ses descendants.

Référence : L. no 99-944, 15 nov. 1999 : JO 16 nov. 1999, p. 16959 JCP G, 1999, IH, 20172

Art. 14. - 1. -Après le troisième alinéa de l'article 14 de la loi n' 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n' 86-1290 du 23 décembre 1986, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« - au profit du partenaire lié au locataire par un pacte civil de solidarité ; ».

Il. - Après le septième alinéa du même article 14, il est inséré un alinéa ainsi rédigé:

« - au partenaire lié au locataire par un pacte civil de solidarité; »

IR. - Dans la deuxième phrase du premier alinéa du 1 de l'article 15 de la même loi, après les mots: « bailleur, son conjoint, », sont insérés les mots: « le partenaire auquel il est lié par un pacte civil de solidarité enregistré à la date du congé, ».

IV. - Dans la deuxième phrase du premier alinéa du 1 du même article 15, après les mots : « ceux de son conjoint », le mot : « ou » est remplacé par les mots: « , de son partenaire ou de son ».

NOTE : Voici enfin venu le temps de la protection des locataires vivant en couple homosexuel ou plus exactement, celle de leur compagnon, qualifié de « partenaire » ou de « concubin » selon. Désormais, ceux-ci pourront bénéficier de la poursuite du bail conclu au profit du locataire malgré le décès ou l'abandon de domicile de celui-ci, solution réservée jusque-là aux couples hétérosexuels par l'article 14. Après une tentative législative pour modifier cet état de choses (Cf. L. 27janv. 1993, déclarée inconstitutionnelle sur ce point), après la résistance de la Cour de cassation, fidèle à la conception traditionnelle du concubinage (V en dernier lieu, Cass. 3 e CiV.~ 17 déc. 1997: Loyers et copr 1998, comm. n, 65; JCP G, 1998,11, 10093, note A. Djigo), la paternité de ce changement revient à la loi tant discutée et médiatisée du 15 novembre 1999 sur le PACS.

La nouvelle rédaction de l'article 14 de la loi de 1989 permet au « partenaire lié au locataire par un pacte civil de solidarité » de profiter de la continuation du bail en cas d'abandon de domicile du locataire ou de son transfert en cas de décès. Mais le changement opéré va plus loin car le compagnon du locataire est protégé alors même qu'aucun PACS n'a été conclu. Cette protection est due à la consécration d'une définition large du concubinage, légalisée dans le nouvel article 515-8 du Code civil. En acceptant le concubinage comme « une union de fait, caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, entre deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en coup,*e », le législateur a évidemment entendu accorder aux concubins homosexuels les mêmes droits que ceux consentis aux concubins hétérosexuels. Les couples homosexuels qui ne veulent pas contracter de PACS pourront tout de même bénéficier du régime protecteur de l'article 14. Ainsi, la personne vivant en couple avec le locataire pourra poursuivre le bail jusqu'à son terme, parce qu'elle était son « partenaire » ou alors son « concubin », qualification visée dès l'origine par l'article 14 mais désormais entendue plus largement. À noter cependant que la loi ne subordonne pas la continuation du bail à une durée de cohabitation préalable d'un an aux occupants liés par un PACS, comme elle l'exige pour les concubins. En cela, la situation du « pacsé » se rapproche de celle du conjoint du locataire.

Cette loi du 15 novembre 1999 a également modifié l'article 15 pour permettre au bailleur de faire profiter la personne avec laquelle elle est liée par un pacte civil de solidarité ou ses descendants d'un droit de reprise pour habiter. Là encore, si ce n'est le partenaire, c'est le concubin homosexuel du bailleur ou ses enfants qui seront éventuellement les bénéficiaires d'un congé pour habiter.