Impôts

Charges déductibles : limite au pouvoir d'ingérence du fisc

Lors de ses investigations, un vérificateur fiscal ne peut remettre en cause la déduction d'une charge si une facture régulière a été produite par l'entreprise.

Que peut, en principe, exiger le vérificateur ?

En cas de contrôle de comptabilité, la question de savoir qui, du fisc ou du contribuable, doit prouver la déductibilité d'une charge, soulève souvent des difficultés pratiques.

La règle de principe jusqu'ici applicable a été posée par une décision du Conseil d'État en 2003 : le vérificateur, qui entend refuser la déduction d'une charge, est en droit d'exiger de l'entreprise qu'elle lui présente non seulement une facture, mais aussi toute pièce justificative établissant la nature et l'existence de la charge.

Assouplissement favorable aux entreprises

Les juges ont récemment apporté des précisions intéressantes susceptibles de clarifier cette délicate question de la charge de la preuve.

Dans l'affaire examinée, le vérificateur contestait la déductibilité par l'entreprise de commissions versées à des tiers en rémunération de leur rôle d'intermédiaire dans l'obtention de marchés publics. Au cours de la procédure, la société vérifiée avait pu établir un lien précis entre les sommes déduites et les marchés obtenus grâce à la présentation de factures et d'un protocole d'accord. Le fisc avait néanmoins rejeté la déduction de la charge considérant ces preuves comme insuffisantes.

Le Conseil d'État lui a donné tort et a estimé que :

- la production par l'entreprise d'une facture régulière réglée par elle suffit à établir la régularité de l'inscription de la charge en comptabilité ;

- le simple fait que l'entreprise ne puisse pas apporter toutes les explications demandées ne permet pas au vérificateur de justifier une réintégration de la dépense dans le résultat imposable.

Conséquences pratiques

Le fisc demeure autorisé à réclamer toute information détenue par l'entreprise. Mais le fait que celle-ci soit en mesure de présenter une facture régulière d'un fournisseur de biens ou d'un prestataire de services suffit pour établir la validité de la charge déduite.

Si le fisc souhaite contester la réalité ou l'intérêt de la dépense pour l'entreprise, c'est à lui de prouver que les marchandises ou les prestations n'ont pas réellement été livrées ou exécutées, en fournissant les éléments de preuve en ce sens. Le contribuable est donc dispensé de devoir apporter la preuve contraire.

Plus généralement, cet arrêt marque une avancée positive pour les contribuables, car il est aussi de nature à restreindre les velléités toujours grandissantes du fisc à s'immiscer dans la gestion des entreprises contrôlées au travers de demandes d'informations de plus en plus précises.

Sources. CE 20 juin 2003, n° 232832 ; CE 21 mai 2007, n° 284719