Le décret et l’arrêté comptable du 14 Mars 2005 

Voici donc publié le " plan comptable " adapté à la copropriété prévu par l’article 14.3 de la loi du 10.07.1967, lui-même institué par la loi Solidarité et Renouvellement Urbain du 13 XII 2000. Il aura fallu quatre ans et trois mois pour que le dispositif (un décret, 5 tableaux, un arrêté) soit publié. Un record.

Plus de quatre années de négociation, donc, pour aboutir à un texte qui, pour une partie, reste encore " monstrueux ", comme on va la voir et qui fait l’impasse sur la " petite copropriété ".

Pour faire vite, avant de rentrer dans une première série d’analyses, nous dirons ceci :
  1. ABSENCE DE REGIME SIMPLIFIE

D’abord, on regrettera vivement que les textes n’aient pas prévu - ceci contre l’avis du Conseil National de la Comptabilité – un régime simplifié pour les petites copropriétés. À l’heure de la simplification tous azimuts, le dispositif sophistiqué et complexe qui va se mettre en place – nécessaire pour les copropriétés en général – frise le ridicule pour les " petites " copropriétés dont il faut rappeler que le budget annuel est environ trois fois inférieur à celui d’une famille française moyenne…Nous n’avons cependant pas l’intention de baisser les bras sur ce point.

  1. DOUBLE PRESENTATION DU COMPTE DE GESTION

En second lieu, on insistera sur le fait que le gouvernement – malgré l’avis contraire unanime d’un groupe d’experts (dont l’ARC) choisis par le ministre du logement Gilles de Robien – n’a pas pu renoncer à l’idée saugrenue d’une double présentation des comptes de charges et produits qui – là encore – va introduire une complexification inutile et stérilisante pour l’immense majorité des copropriétaires.

Et dire que l’objectif recherché par tous était la présentation simple des comptes à tous les copropriétaires.

La question que l’on peut se poser est celle-ci : pourquoi avoir consulté si longtemps ? Pourquoi nous avoir fait perdre des centaines d’heures si c’était pour passer outre l’avis unanime des personnes consultées, hauts fonctionnaires exceptés ? Nous allons naturellement poser la question à Jean-Pierre Raffarin.

  1. BEAUCOUP DE BONNES DISPOSITIONS, POURTANT

Nos regrets sont d’autant plus vifs et notre amertume profonde que, par ailleurs, ces textes, longuement négociés comme on l’a dit, contiennent des dispositions excellentes, même si elles ne sont pas évidentes au premier abord. Nous allons tenter de donner une première idée de ces dispositions.

Comment allons-nous faire pour vous aider à comprendre ces nouveaux textes ?

Ces nouveaux textes (voir en fin d’article) sont assez complexes – non seulement pour des personnes qui ne connaissent pas bien la comptabilité, mais même pour des comptables.

Nous allons simplement nous contenter de vous faire connaître les principaux points qui vont changer, ceci pour vous donner une idée des modifications apportées à la situation actuelle.

Vous trouverez donc dans les pages qui suivent une présentation succincte des modifications essentielles apportées par les textes publiés le 18 mars au Journal Officiel.

Les innovations du décret et de l’arrêté en matière :

I. De tenue des comptes.

II. De clôture des comptes.

III. De présentation des comptes.

 
Le décret et l’arrêté du 14 mars 2005 introduisent des règles nouvelles (pour la copropriété) en matière de tenue des comptes, de clôture de comptes et de présentation des comptes.

Nous présentons ci-dessous de manière succincte ces innovations dont certaines vont très loin, comme on va s’en rendre compte.

Puis, nous ferons un rapide commentaire à la fin de chaque point.

On verra que, alors que nous sommes très favorables à certains aspects de ces textes (et pour cause, cela ne fait que quatre ans que nous les négocions, souvent contre vents et marées), nous sommes très critiques à l’égard de certains autres aspects, en particuliers certains tableaux de présentation des comptes.

I - Innovations en matière de tenue des comptes

AVANT

APRÈS


1. Chaque syndic tenait la comptabilité qu’il voulait (de trésorerie ou d’engagement).


1. Tous les syndics seront obligés de tenir une comptabilité dite d’engagement. C’est-à-dire que les montants des charges et produits concernant tel exercice ne sont pas comptabilisés lorsqu’il y a dépense ou encaissement mais lorsque la charge est  " engagée " ou le produit appelé (provisions, loyers) ou attendu.

Ce système permet de fournir un état des dettes et des créances qui permet d’avoir une vision fidèle de la situation financière d’une copropriété.


2 . La comptabilité pouvait être tenue en partie simple (une écriture par événement au débit OU au crédit).


2. La comptabilité devra être tenue en partie double (deux écritures par événement, une au débit d’un compte, l’autre au crédit d’un autre compte ce qui permet, entre autre, un meilleur autocontrôle).


3 . Les exercices comptables pouvaient être modifiés facilement.


3. Les dates des exercices comptables seront - une fois celles-ci choisies – presque intangibles (elles ne pourront être modifiées qu’une fois tous les cinq ans).


4 . Lorsqu’un syndic tenait une comptabilité d’engagement, c’est lui-même qui, en l’absence de " norme comptable ", définissait la notion d’engagement et le moment de la comptabilisation (qui pouvait d’ailleurs n’être pas toujours identique chez un même syndic).

4. Désormais les charges et produits devront être " constatés " (c’est-à-dire entrés dans la comptabilité) à des moments précis spécifiés par le décret.

5 . Le syndic pouvait ne tenir qu’un seul compte par copropriétaire.

5 . Il pourra continuer à le faire, mais devra être capable – à la demande – de ventiler les

sommes dues en :

- charges courantes

- provisions pour travaux

- avances

- emprunts

Si l’assemblée générale le lui demande, il devra même ouvrir quatre sous-comptes par copropriétaire.

6 . Il n’y avait aucun plan de comptes obligatoire ; certains adoptaient le plan comptable général d’autres utilisaient des règles à eux.

6 . Les syndics devront utiliser un plan de comptes applicable à TOUTES les copropriétés. Si le plan ne suffit pas ils ne pourront PAS créer de nouveaux comptes mais seulement des sous-comptes.

À noter : entre autres innovations, ce plan définit précisément les comptes qui concernent les différents types d’honoraires de syndic, comme nous le demandions depuis longtemps.

7 . Le syndic pouvait mélanger (dans les comptes) des fonds de natures différentes, par exemple " avances pour travaux " et " avances pour compenser les impayés ".

Le syndic pouvait garder indéfiniment en compte des " créances irrécouvrables " (débiteurs restant devoir de l’argent même après la vente de leur logement) ce qui avait des effets négatifs sur la trésorerie.

7 . Le syndic devra respecter le plan de comptes qui oblige à distinguer les fonds selon leur nature et leur destination.

 

Il aura désormais l’obligation impérative d’apurer les créances irrécouvrables et de provisionner les sommes correspondantes dès la décision de lancement d’une saisie immobilière par l’assemblée.





















































































II - Innovations en matière de clôture des comptes

 

AVANT

APRES

9- En fin d’exercice, il n’y avait pas d’obligation de rembourser aux copropriétaires les excédents de cet exercice.

10- Il n’y avait aucune obligation de " répartir ou d’affecter les produits " (donc, là aussi, de restituer aux copropriétaires ce qui leur revenait).

 

11- Rien (malheureusement) n’interdisait au syndic de garder des sommes en " compte d’attente " (autre moyen pour certains syndics de garder l’argent des copropriétaires et de le faire fructifier à leur profit).

9- Désormais, le syndic devra rembourser ces sommes en fin d’exercice.

 

10- Désormais, les syndics seront obligés de tenir compte des produits et de les répartir avec la clôture des comptes (ou de proposer une affectation aux copropriétaires).

11- Désormais, les comptes d’attente ne pourront être qu’exceptionnels. S’il en reste un, il devra être justifié aux copropriétaires LIGNE à LIGNE en annexe aux tableaux de présentation des comptes.



 III - Innovations en matière de présentation des comptes aux copropriétaires

 

AVANT

APRES

12- Les syndics devaient fournir un " état des dettes et des créances " mais, faute de précision, cet état pouvait être réduit à sa plus simple expression (et donc rester totalement opaque).

 

13- Il n’était pas obligatoire de fournir la liste nominative des débiteurs (du moins ce problème restait FLOU).

 

14- Aucun modèle de tableaux de présentation des comptes n'existait.

12- Les syndics devront désormais fournir un état de dettes et des créances en respectant un tableau-type annexé au décret, de façon à ne pas fournir des chiffres (trop globaux donc incompréhensibles).

 

13- La liste des débiteurs DEVRA être jointe aux tableaux de synthèse des comptes adressés à tous les copropriétaires.

14- CINQ modèles (annexés au décret) devront être impérativement utilisés par les syndics :

-un pour la situation de trésorerie et l’état des dettes et des créances ;

-un pour le compte de gestion (par nature) des charges et produits ;

-un pour le compte des charges courantes par catégorie ;

-un pour le compte des charges non courantes par catégorie ;

-un pour les travaux en cours.