Audience pénale Huissier de justice

Circulaire de la DACG n° CRIM 07-16/E6 du 19 décembre 2007 concernant l’application des dispositions relatives aux huissiers de justice audienciers en matière pénale, telles que résultant des articles 16 (IV) et 18 du décret n° 2007-1388 du 26 septembre 2007, pris pour l’application de la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance et modifiant le code pénal et le code de procédure pénale

NOR : JUSD0769646C

Textes source :

Article 11 du décret n° 56-222 du 29 février 1956 modifié pris en application de l’ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers de justice ;

Article R. 179 du code de procédure pénale.

La garde des Sceaux, ministre de la Justice à Mesdames et Messieurs les procureurs généraux près les cours d’appel ; Mesdames et Messieurs les procureurs de la République près les tribunaux de grande instance (pour attribution) et à Mesdames et Messieurs les premiers présidents des cours d’appel ; Mesdames et Messieurs les présidents des tribunaux de grande instance (pour information)

Le bon fonctionnement de l’institution judiciaire ne saurait être garanti sans le concours des auxiliaires de justice que constituent, notamment, les huissiers de justice. En effet, ces derniers sont des partenaires indispensables à la bonne marche du service public de la justice, non seulement pour la signification des actes de procédure et l’exécution des décisions de justice, mais également durant le temps de l’audience, civile comme pénale.

En matière civile, les missions des huissiers audienciers ont été redéfinies par le décret n° 2004-836 du 20 août 2004 portant modification de la procédure civile, lequel a limité l’obligation de service de ces derniers aux audiences solennelles, à l’appel des causes et, à titre exceptionnel, au maintien de l’ordre sous l’autorité du président.

Il était nécessaire de prévoir également une évolution en matière pénale, sans toutefois qu’une stricte correspondance pût être envisagée avec la réforme intervenue en procédure civile, compte tenu des spécificités propres au domaine pénal.

Dans un premier temps, le décret n° 2002-1067 du 5 août 2002 modifiant l’article R. 181 du code de procédure pénale et le décret n° 96-887 du 10 octobre 1996 et relatif aux émoluments alloués aux huissiers de justice et à l’aide juridique, a revalorisé la rémunération des citations et des significations.

Mon attention a par la suite été appelée par la Chambre nationale des huissiers de justice et par plusieurs chambres départementales, sur les difficultés rencontrées par les huissiers audienciers dans l’exercice de leurs missions, difficultés dont plusieurs parquets généraux se sont de surcroît fait l’écho.

C’est dans le but de pallier ces dernières, tout en garantissant un bon fonctionnement des audiences pénales, que les missions des huissiers audienciers ont été redéfinies, et leur rémunération revalorisée par le décret n° 2007-1388 du 26 septembre 2007, pris pour l’application de la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance et modifiant le code pénal et le code de procédure pénale.

La présente circulaire, qui s’inscrit dans le droit fil des réflexions d’un groupe de travail créé en 2005, vise à expliciter le contenu de ces nouvelles dispositions, tout en rappelant par ailleurs les principes généraux devant présider à l’exercice des missions des huissiers audienciers en matière pénale.

1. La redéfinition des missions des huissiers audienciers en matière pénale

S’agissant de l’audience pénale, il résulte de l’article 11 du décret n° 56-222 du 29 février 1956 modifié pris en application de l’ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers de justice, que ces derniers ont désormais pour fonctions d’assister aux audiences solennelles et aux audiences publiques, à l’exclusion des audiences de la juridiction de proximité, et à titre exceptionnel s’agissant des audiences de la chambre des appels correctionnels, de faire l’appel des causes et, lorsque le déroulement des débats le justifie, de maintenir l’ordre sous l’autorité du président.

1.1. La détermination des audiences où l’assistance des huissiers de justice est obligatoire
1.1.1. Les juridictions concernées

Les huissiers audienciers sont désormais déchargés de l’obligation de prêter leur concours aux audiences des juges de proximité, concours qui avait été prévu par le décret n° 2004-1021 du 27 septembre 2004 portant modification du code pénal et du code de procédure pénale et relatif notamment au stage de citoyenneté, à la composition pénale, aux sûretés prononcées dans le cadre d’un contrôle judiciaire et à la juridiction de proximité.

Outre les audiences solennelles et celles de la Cour de cassation (1), pour lesquelles l’assistance des huissiers de justice n’est pas remise en question, la présence des huissiers audienciers ne doit donc être systématique qu’aux seules audiences des cours d’assises, des cours d’assises des mineurs, des tribunaux correctionnels, des tribunaux pour enfants et des tribunaux de police.

Il convient de préciser que le service des huissiers audienciers n’est pas exclu du cadre de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC), pendant la seule phase de validation, par le juge, de la peine proposée par le procureur de la République.

S’agissant des audiences des cours d’appel, et pour tenir compte, par ailleurs, des pratiques actuellement en vigueur, seule l’assistance des huissiers audienciers lors des audiences des chambres des appels correctionnels peut être envisagée, de manière exceptionnelle, limitée aux cas où un service de police de l’audience s’impose particulièrement. A contrario, ces mêmes pratiques ont démontré l’absence de nécessité d’une présence des huissiers lors des audiences des chambres de l’instruction.

Il est permis de rappeler que les juridictions fixent l’ordre de service des huissiers audienciers chaque année, dans la première quinzaine qui suit la rentrée judiciaire et après avoir consulté les intéressés, en application de l’article 12 du décret du 29 février 1956 précité.

Dans les limites fixées par la présente circulaire, il convient également de rappeler qu’en vertu de l’article 15 de ce même décret, les huissiers audienciers sont tenus d’exercer leur ministère toutes les fois qu’ils en sont requis. Cette contrainte est d’autant plus nécessaire que le service des audiences pénales précitées compte parmi les attributions exercées par les huissiers de justice à titre de monopole.

1.1.2. Le temps de présence obligatoire

Lors des audiences publiques susénumérées, le temps de présence des huissiers audienciers doit être limité au regard de la durée totale de l’audience. Il convient qu’il soit apprécié par le président, en fonction des actes nécessaires au bon déroulement des débats.

Ainsi, à titre d’exemple, quelle que soit la durée totale de l’audience, la présence des huissiers audienciers ne s’impose pas lorsque les dossiers à examiner concernent des décisions à intervenir par défaut. Elle ne présente pas plus de nécessité lorsque la nature des affaires audiencées ne rend indispensable aucune mesure de police : notamment, lors des audiences correctionnelles siégeant à juge unique, le service de l’huissier de justice doit pouvoir se limiter, sauf exception, à l’appel des causes.

Inversement, et exceptionnellement, la présence de l’huissier audiencier pourra être envisagée au-delà de l’appel des causes (cf. infra) lorsque le président estimera que le déroulement des débats justifie que soit assurée la police de l’audience. Ainsi, une présence permanente des huissiers de justice pendant les audiences correctionnelles de comparution immédiate apparaît souhaitable.

La présence des huissiers de justice doit impérativement être maintenue pendant toute la durée des audiences des cours d’assises.

1.2. L’étendue des missions dévolues aux huissiers audienciers en matière pénale

1.2.1. L’appel des causes L’huissier audiencier permet l’accès du public à la salle d’audience.

Au début de l’audience, il procède sous contrôle du Président à l’appel des causes en appelant les parties aux dossiers inscrits au rôle, ainsi que les témoins y afférant. Sont également accueillis les avocats, les interprètes, les experts et toutes personnes susceptibles de participer aux débats.

Lorsque plusieurs dossiers sont fixés, l’huissier audiencier détermine l’ordre précis dans lequel les affaires seront successivement examinées. Sur ce point, et selon l’usage du Palais, l’ordre suivant paraît devoir être privilégié : – dossiers dans lesquels un prévenu est détenu ;

(1) Il convient de noter que le décret 26 septembre 2007 n’a apporté aucune modification au rôle des huissiers audienciers devant la Cour de cassation et lors des audiences solennelles.


dossiers dans lesquels la défense de l’une des parties est assurée par le bâtonnier de l’ordre des avocats territorialement compétent ;

dossiers dans lesquels la défense de l’une des parties est assurée par un avocat extérieur au barreau territorialement compétent ;

dossiers dans lesquels le prévenu est présent et où la défense de l’une des parties est assurée par un avocat du barreau territorialement compétent ;

dossiers dans lesquels le prévenu est absent et où la défense de l’une des parties est assurée par un avocat du barreau territorialement compétent ;

dossiers dans lesquels aucune des parties n’est assistée d’un avocat et où la victime ou la partie civile est présente ; dossiers dans lesquels aucune des parties n’est assistée d’un avocat et où le prévenu est présent ; autres dossiers.

Cet ordre peut toutefois connaître des exceptions, notamment lorsque l’une des parties justifie être atteinte d’un handicap ou d’une maladie particulière nécessitant que le dossier la concernant soit traité en priorité.

Par ailleurs, conformément aux principes posés par la circulaire 20 mai 2005 présentant les dispositifs relatifs à l’accueil des victimes dans le cadre du procès pénal, il importe que les huissiers audienciers veillent à informer les plaignants présents du délai prévisible dans lequel l’affaire les concernant sera appelée, afin de leur éviter une attente inutile : par exemple, les procédures nécessitant un renvoi pourront être immédiatement traitées, ou des plages horaires fixées pour l’examen de certains dossiers.

Il ressort également de cette circulaire qu’il apparaît opportun que, dès leur identification par l’huissier audiencier, les victimes soient invitées par ce dernier à prendre une des places qui leur sont réservées, dans l’hypothèse où la salle est dotée d’un emplacement dédié à ces fins (par exemple, un banc situé derrière celui des avocats).

Enfin, l’huissier audiencier transmet au président de l’audience les pièces fournies par les parties et remises, au moment de l’audience, au soutien de leur défense ou de leurs demandes. Il sort les dossiers, les remet au président et appelle les affaires au fur et à mesure du déroulement de l’audience et selon l’ordre précité.

1.2.2. Le maintien de l’ordre sous l’autorité du président

A titre liminaire, il convient de préciser que, quoique le recours aux termes de « police de l’audience » ou de « maintien de l’ordre » soit courant pour désigner l’une des missions des huissiers audienciers, il ne s’agit en rien, pour ces derniers, d’assumer le rôle de maintien de l’ordre public tel qu’il est dévolu aux représentants des forces de l’ordre. En effet, ces notions doivent s’entendre comme l’ensemble des mesures destinées à permettre un bon déroulement de l’audience. En cas de difficultés à mettre à exécution une décision du président en matière de police de l’audience, ce dernier doit faire appel à la force publique (1), et non pas à l’huissier audiencier.

Ainsi conçue, la police de l’audience est assurée, sous l’autorité du président (2), par l’huissier audiencier et peut conduire ce dernier à procéder, notamment, aux actes suivants :

a) Aux audiences de la cour d’assises :

expulser de la salle d’audience des personnes nuisant au bon déroulement des débats ;

faire sortir de la salle d’audience un témoin pendant la déposition d’un autre témoin à la barre. b) Aux audiences du tribunal correctionnel :

Expulser de la salle d’audience des personnes nuisant au bon déroulement des débats (3), y compris le prévenu lui­même lorsque ce dernier est à l’origine du trouble (4) ; il est alors appelé à comparaître à nouveau au moment du jugement, afin que celui-ci soit rendu en sa présence ;

Interdire l’accès de la salle d’audience aux mineurs, ou à certains d’entre eux (5).

(1) Article 404 du code de procédure pénale in fine en matière correctionnelle, par exemple.

(2) Les pouvoirs de police de l’audience conférés au président sont prévus à l’article 309 du code de procédure pénale s’agissant de la cour d’assises, aux articles 401 et suivants du même code s’agissant du tribunal correctionnel, aux articles 535 et suivants du même code s’agissant du tribunal de police, à l’article 20 de l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante s’agissant de la cour d’assises des mineurs, et à l’article 14 de la même ordonnance s’agissant du tribunal pour enfants.

(3) Article 404 du code de procédure pénale. (4) Article 405 du code de procédure pénale. (5) Article 402 du code de procédure pénale.

c) Aux audiences du tribunal de police (1) :

expulser de la salle d’audience des personnes nuisant au bon déroulement des débats, y compris le prévenu lui-même lorsque ce dernier est à l’origine du trouble ; il est alors appelé à comparaître à nouveau au moment du jugement, afin que celui-ci soit rendu en sa présence ;

interdire l’accès de la salle d’audience aux mineurs, ou à certains d’entre eux.

d) Aux audiences du tribunal pour enfants

Il n’est dérogé par aucune disposition spécifique, dans l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante, aux règles générales relatives à la police de l’audience en matière correctionnelle. Dès lors, les actes de police de l’audience rappelés supra et pouvant être mis en œuvre par l’huissier audiencier, trouvent à s’appliquer devant le tribunal pour enfants.

En outre, il appartient à l’huissier audiencier, sous la direction du président, de faire respecter les règles spécifiques relatives à la publicité restreinte des audiences du tribunal pour enfants posées à l’article 14 de l’ordonnance précitée. A cet égard, l’huissier audiencier peut être amené, à la demande du président, à :

faire sortir le mineur de la salle d’audience pendant tout ou partie de la suite des débats ;

faire sortir les témoins de la salle d’audience après leur audition. e) Aux audiences de la cour d’assises des mineurs

De manière générale, il ressort de l’article 20 de l’ordonnance du 2 février 1945 susmentionnée que sont conférés au président de la cour d’assises des mineurs les mêmes pouvoirs que ceux dévolus au président de la cour d’assises dans le code de procédure pénale. Il appartient ainsi à l’huissier audiencier, à la demande du président, de procéder aux actes énumérés ci-dessus dans le cadre des pouvoirs de police des audiences des cours d’assises.

En outre, il ressort du même article une compétence spécifique à la cour d’assises des mineurs : l’huissier audiencier peut, à tout moment après l’interrogatoire des accusés et à la demande du président, faire sortir de la salle d’audience l’accusé mineur pendant tout ou partie de la suite des débats.

La revalorisation des indemnités des huissiers audienciers en matière pénale

Conformément à l’état du droit antérieur à l’entrée en vigueur du décret n° 2007-1388 du 26 septembre 2007 précité, les indemnités allouées aux huissiers audienciers en compensation de leur service d’audience restent forfaitaires et variables selon le type d’audience. Ces émoluments sont toutefois revalorisés.

En outre, des indemnités spécifiques sont instaurées dans le cadre du service d’audience devant les chambres des appels correctionnels, émoluments qui n’étaient pas prévus antérieurement.

Ainsi, les indemnités prévues par l’article R. 179 du code de procédure pénale sont désormais fixées comme suit, par jour d’audience :

audiences de la Cour de cassation : 20

;

audiences des tribunaux de police : 15

;

audiences des tribunaux correctionnels :

30 ;

audiences des tribunaux pour enfants : 30 ;

audiences des chambres des appels correctionnels : 30 ;

   audiences des cours d’assises : 50 .



Dispositions transitoires

La liquidation de la créance procédant de la certification, les tarifs revalorisés relatifs aux services des huissiers audienciers en matière pénale, tels qu’issus du décret du 26 septembre 2007 précité, s’appliquent à tous les états de frais non certifiés à cette date.

Les tarifs nouvellement institués pour les audiences des chambres des appels correctionnels ne sont applicables qu’aux audiences postérieures au 26 septembre 2007.

La suppression de la rémunération relative à l’intervention des huissiers de justice audienciers lors des audiences des juges de proximité, ne porte que sur les audiences postérieures à cette date.

Vous voudrez bien prendre toutes mesures utiles pour l’application de la présente circulaire et me rendre compte, sous le timbre du bureau de la police judiciaire de la Direction des affaires criminelles et des grâces, de toute difficulté qui pourrait survenir dans sa mise en œuvre.

Pour la garde des Sceaux, ministre de la Justice : Le directeur des affaires criminelles et des grâces,

JEAN-MARIE HUET

(1) En vertu de l’article 535 du code de procédure pénale, les dispositions des articles 400 à 405 de ce même code, relatives à la police de l’audience en matière correctionnelle, sont applicables aux audiences du tribunal de police.